La fusion

Manifestation à Shawbridge pour le choix du nom de la nouvelle municipalité en 1973 - Histoire et Archives Laurentides, Fonds L'Écho du Nord, P031,S01,D029
Manifestation à Shawbridge pour le choix du nom de la nouvelle municipalité en 1973 - Histoire et Archives Laurentides, Fonds L'Écho du Nord, P031,S01,D029

Durant les années 1960 et 1970, le Québec connaît une période de regroupement et de rassemblement dans diverses structures sociales, que ce soit scolaire, syndicale ou municipale. Il suffit de penser à la création de la Ville de Laval en 1965 et à la fusion des municipalités du territoire de Mirabel en 1971.

L’idée d’unir les villages de Shawbridge, Lesage et Prévost est abordée dans les discussions des conseils municipaux dès 1963 et plus activement dès 1970. Durant ces années-là, les comtés fédéraux séparaient alors Lesage, dans le comté de Saint-Jérôme, de Shawbridge et Prévost, du comté de Saint-Sauveur, et chacun des villages avait ses écoles primaires et sa propre commission scolaire. Tous trois faisaient appel au gouvernement pour des travaux d’immobilisation, des acquisitions de matériel pour les écoles, des améliorations de leur réseau d’aqueduc et les services d’incendie. Le gouvernement libéral offre alors d’octroyer les subventions nécessaires si les trois municipalités fusionnent avec celle de Sainte-Anne-des-Lacs qui s’est rapidement désistée. C’est donc par nécessité financière que Shawbridge, Lesage et Prévost fusionnent puisque chaque village a de grands besoins de rafraichissement de ses structures vieillissantes. D’autant plus que chacun espère pouvoir profiter de possibles retombées économiques avec la construction du nouvel aéroport de Mirabel en 1975. La fusion permettrait une meilleure efficacité de fonctionnement en améliorant les services municipaux.

Les discussions entourant la fusion ont été menées par les trois conseils municipaux dont les maires étaient Jean St-Aubin pour Shawbridge, Roger Pagé pour Lesage et Marc Gagnon pour Prévost. La majorité de la population semble favorable au projet de fusion puisqu’il sera bénéfique à la santé financière et à la croissance des villages. Shawbridge connaît un mouvement en défaveur, les citoyens demandant que la municipalité se retire de la fusion. Cependant, la question du futur nom de la nouvelle municipalité reste une source de rivalité entre bien des citoyens.

En 1972, les trois conseils municipaux choisissent, après un accord majoritaire, le vocable « Shawbridge ». Les principaux arguments en faveur de ce nom sont nombreux. D’abord, il s’agit de la plus vieille municipalité des trois ainsi que la plus connue. De plus, elle possède une position avantageuse, au centre des trois agglomérations, et semble donc être la plus représentative, même si elle est moins populeuse que Lesage. La même année, les conseils municipaux décident aussi que le nouveau centre administratif de la future municipalité sera situé dans l’actuel hôtel de ville de Lesage, inauguré en 1966.

Or, la population ne semble pas en accord avec la décision de choisir le nom Shawbridge. Ceux en défaveur vont valoir que le Québec est une province francophone, que la majeure partie des citoyens de la future municipalité sont aussi francophones et qu’il est donc anormal de choisir un nom anglophone. La population anglophone est concentrée à Shawbridge et correspond à seulement 20% des habitants. Près de 400 citoyens ont signé une pétition afin de changer le nom de la future municipalité.

Cependant, le 20 janvier 1973, Shawbridge, Lesage et Prévost fusionnent sous le nom de Corporation municipale de Shawbridge, avec Roger Pagé comme nouveau maire. Des citoyens continuent de contester ce choix trop anglophone et l’affaire est amenée devant le Conseil municipal qui décide de suivre la volonté de sa population. Lors des élections du 4 novembre, en plus d’élire le maire, les habitants doivent aussi se prononcer sur le nom de la municipalité. Ils ont le choix entre Lesage, Shawbridge et Prévost seulement[1]. Les résultats sont serrés : 629 voix en faveur de Prévost contre 608 pour Shawbridge. Le vocable Lesage est loin derrière avec 116 votes. Or, malgré ces résultats et une résolution majoritaire du conseil pour un changement, le nom de la municipalité reste Shawbridge puisqu’en 1974, le ministère des Affaires municipales, Victor Goldbloom, tranche et décide de conserver le vocable Shawbridge.

Toutefois, les démarches ne se sont pas arrêtées à la suite de cette décision. Deux ans plus tard, le conseil municipal sous le maire Roger Landry relance le débat et propose le nom de Belvédère, qui est refusé par M. Goldbloom. Finalement, c’est en 1977 que le maire Réjean Lesage décide de suivre le choix du référendum de 1973 et d’opter pour le nom Prévost.

Parmi les autres vocables proposés, on retrouve Bélair, Bonair, Beaumont, Rivière-du-Nord, Mirador, Miramont et Val-des-Monts, qui sera plutôt utilisé pour nommer l’ancienne école primaire Notre-Dame.

Grâce à la fusion, la nouvelle municipalité a pu obtenir une subvention gouvernementale pour rénover ses infrastructures. Le regroupement a permis d’améliorer les services de voirie, d’entretien des chemins, d’incendie, d’aqueduc et des ordures ménagères, en plus d’éviter des dédoublements de services administratifs entre les hôtels de ville de Lesage et de Shawbridge.

[1] PV 9 octobre 1973