Dès les années 1890, quelques maisons de pension ouvrent leur porte à Shawbridge. Joseph Renaud semble être le premier à offrir ce type d’hébergement avant même l’arrivée du train. Des commis voyageurs, des colons en déplacement et des journaliers pouvaient alors s’y reposer. Le développement du chemin de fer dans les Laurentides et l’implantation d’arrêts à Lesage et à Shawbridge en 1892 favorisent la transformation de résidence privée en maison de pension et la construction de nouveaux établissements pour accueillir les touristes qui viennent profiter de l’air pur du Nord. Les établissements sont tenus autant par des familles anglophones, comme les Shaw ou les Stephens, que des francophones comme les Girard ou les Lalande. Quelques petits commerces de proximité voient le jour, comme les boulangeries de Max Sigouin ou de J.-B. St-Pierre vers 1910 ou le restaurant de Napoléon Bastien vers 1915[1].
Été comme hiver, les villégiateurs affluent sur le territoire de Prévost. Shawbridge est longtemps considéré comme le berceau du ski dans les Laurentides. Des expéditions annuelles ont attiré des mordus du ski nordique provenant du Québec et même des États-Unis et d’Europe. L’invention du remonte-pente par Alex Foster et l’ouverture de pentes de ski sur le territoire de Prévost marquent le début d’une nouvelle ère pour la pratique du ski et une augmentation considérable du nombre de vacanciers. Durant l’été, la rivière du Nord et les lacs attirent les villégiatures qui viennent profiter de l’air pur. Ceux-ci séjournent en toute saison à Shawbridge, mais aussi dans le Vieux-Prévost et à Lesage. Pour satisfaire à leurs besoins, des commerces de proximité ouvrent leur porte, particulièrement dans les années 1930 à 1950.
Plusieurs autres maisons de pension, hôtels, motels ou chalets en location ont existé au fil des ans dans l’un des trois villages, comme l’Auberge Côté (Shawbridge) ; l’Auberge Ernest Loiselle (Shawbridge), une pension familiale de huit chambres ; l’Auberge de la Garde, une pension pour jeunes filles à la fin des années 1930 ; l’Hôtel Lamarche (Shawbridge) ; l’hôtel et motel laurentien (Lesage) où dans les années 1960 des soirées dansantes sont organisées ; l’Hôtel Pastel (Shawbridge) où l’on offre la livraison de repas, etc. Certains de ces établissements ont marqué plus profondément le paysage :
Hôtel Renaud
Avant même l’arrivée du train, l’hôtel Renaud est construit à Shawbridge, vers 1890 ou avant, par Joseph Renaud. En 1901, Honoré Lesage acquiert l’établissement. Monsieur Renaud semble cependant tenir une autre exploitation hôtelière au moins jusqu’en 1904.
Hôtel Lesage (Lesage)
À Lesage, dès 1896, l’hôtel du même nom est construit par un certain monsieur Latour. On y offre un service d’hébergement et de restauration ainsi qu’une écurie pour loger les chevaux des clients. On peut y manger des œufs dans le vinaigre et des langues de porc, mais ce sont les soirées de cartes qui attirent les citoyens. En 1911, il serait la propriété de Joseph Tanguay qui le revend en 1929 à Dominique Chartier. L’hôtel de dix chambres prend le nom de son nouveau propriétaire. Acquis par Camille Côté en 1941, celui-ci le revend à Henri Bigras quatre ans plus tard. L’établissement est alors connu sous le nom d’Hôtel Bigras. Rasé par les flammes, il est reconstruit sur le même emplacement et devient la propriété de Stanley Anczurowski, vers 1960. À la taverne s’ajoutent une cuisine et une salle à manger, puis une salle de spectacle pouvant accueillir jusqu’à 500 personnes. Anczurowski s’associe à Carlo Carcese et à Claude Ouellette en 1970, puis vend ses parts trois ans plus tard. Sous la seule gouverne de Carlo Carcese, dans les années 1980, de nombreux artistes québécois de musique western, mais aussi de musique populaire, s’y produiront comme les Classels et Boule Noire. On y présentera même la pièce Waiter. En 1992, Carcese ferme le bar-salon et transforme l’hôtel en édifice à logements.
Pensions Shaw
William Shaw (fils) et Mme Jos. Shaw possèdent des maisons de pension dans le village de Shawbridge dès le début des années 1900.
Hôtel Maple Leaf Inn (Shawbridge)
Construit en 1936, l’hôtel s’est d’abord appelé Maple Leaf Inn puis Manoir des Monts. Réputé pour ses murs en pin naturel, l’hôtel est entièrement fait en bois. On y propose différents services : hébergement, piscine, tennis, cours de ski, etc. Le 27 mars 1948, un terrible incendie ravage complètement l’immeuble causant 275 000 $ de dommages. La bâtisse de trois étages brûle en moins de deux heures. L’hôtel était situé sur la rue Principale à la hauteur de la rue Maple. Il ne reste aujourd’hui que la piscine et le terrain de tennis qui sont utilisés comme infrastructures municipales.
Riverside House (Vieux-Prévost)
Dans les années 1930, cette maison de pension située près du pont Shaw est tenue par Mme Marshall. À la suite de rénovations, elle double le nombre de chambres entre 1936 et 1939, passant de 10 à 20 chambres.
Bridge House (Vieux-Prévost)
Cette maison de pension, ouverte à l’année, est située près du pont Shaw. Des chaloupes et des canots ainsi que deux terrains de tennis situés à l’arrière du bâtiment, sont mis à la disposition des touristes.
Hôtel Le Mont-Cassin (Shawbridge)
L’établissement d’une quinzaine de chambres, construit à deux pas de la gare de Shawbridge, porte d’abord le nom d’Hôtel Bellevue. Le propriétaire est Napoléon Saint-Aubin. À partir de 1946-1947, Conrad Gauthier, hôtelier de Montréal, l’acquiert et procède à d’importantes rénovations : 24 chambres modernes, deux bars et une salle à manger. Le lieu prend le nom de Mont-Cassin Lodge. La location d’une chambre, à cette époque, coûte 3,50 $ par jour. La Côte Beaulieu, située derrière la bâtisse, amène son lot de skieurs surtout avec l’installation de deux remonte-pentes vers 1947. Au début des années 1950, Gérard Cloutier en devient le propriétaire. Des soirées d’après-ski avec projections de films pour les membres du club Tyrol y sont proposées. Un peu avant 1972, l’emplacement est vendu. À la suite de nouveaux aménagements, on le nomme Hôtel Motel Mocassin. Dans les années 1980, l’hôtel-motel devient le UpNorth et l’on y trouve le bar homosexuel Le Secret. Au début des années 1990, l’hôtel est baptisé Auberge Prévost. Vers la fin des années 1990, le motel est sectionné pour offrir des emplacements de restauration. Le bar B52 et le restaurant Bozo y sont logés. En 1999, le bâtiment initial et des unités du motel sont démolis pour faire place à l’actuel Faubourg de la Station. En 2019-2020, le Faubourg est agrandi pour y offrir de nouveaux espaces commerciaux.
Rendez-vous Lodge (Lesage)
Situé au sud du lac Écho, aux limites de Saint-Hippolyte, le Rendez-vous Lodge prend plus tard le nom d’Hôtel Rainville. De nombreuses activités pouvaient s’y pratiquer, été comme hiver : tennis, natation, canotage, pêche, ski, raquette, patin.
Auberge Le Viking (Lesage)
Située dans un ancien lieu de retraite des Jésuites, au bord du lac Écho, l’auberge comprend un restaurant gastronomique fort réputé à la fin des années 1960. Les propriétaires sont Louis Ouellette et George Kinsborough.
Motel Le Paysan (Lesage)
Propriété de M. et Mme Raymond Maisonneuve, l’établissement est inauguré en grande pompe en septembre 1963 en présence du ministre du Tourisme, Lionel Bertrand. Situé sur la route 11 (aujourd’hui la route 117), le motel de 30 unités comprend de nombreux services, dont une piscine intérieure chauffée, une salle de quilles, une salle à manger et une salle de réception ainsi qu’un garage intérieur. En octobre 1964, un incendie détruit entièrement le motel. Les pompiers de Saint-Jérôme sont appelés sur les lieux, mais il n’y a pas assez de pression d’eau dans les tuyaux pour éteindre le feu. L’incendie est criminel et des accusations sont portées contre le Montréalais Jean-Claude Borduas, surnommé La Torche. Après deux ans de pénitencier, celui-ci est acquitté puisque le propriétaire, M. Raymond, aurait volontairement voulu mettre le feu à son bâtiment à la suite de difficultés financières.
À partir des années 1950 et 1960, la villégiature hivernale perd alors du terrain au profit de Saint-Sauveur et de Mont-Tremblant, puis la pollution importante de la rivière du Nord sonne le glas du tourisme estival. Les chalets sont transformés en résidence permanente et à partir des années 1970 la population augmente rapidement. Aujourd'hui, le tourisme à Prévost en est principalement un de plein air. Souhaitant redevenir un pôle récréotouristique important, Prévost encourage le développement de plateaux sportifs plus régionaux. En 1983, lorsque le Parc régional de la Rivière-du-Nord est fondé, la Municipalité participe au projet de déploiement de sentiers qui se terminent sur son territoire et en profite pour bonifier l’offre sportive en construisant un terrain de baseball et des terrains de soccer. Une dizaine d’années plus tard, la piste multifonctionnelle du P’tit train du Nord est aménagée, suivant l’ancien tracé de la ligne du Canadien Pacifique. D’autres sentiers sillonnent le territoire, comme ceux de la Réserve naturelle Alfred-Kelly et du parc de la Coulée. Que ce soit à pied ou à vélo, le territoire de Prévost est le terrain de jeu parfait pour les amoureux de la nature.
[1] Sources : Lovell’s Business directory of the Province of Quebec (BAnQ).