Prévost est l’une des cinq villes qui composent la MRC de La Rivière-du-Nord. Elle compte 13 692 citoyens selon le recensement de 2021. Situé entre les plaines des Basses-Laurentides et les montagnes des Moyennes-Laurentides, Prévost se définit par un paysage où vallées, terrains plats et basses collines se côtoient sur un territoire de 35 km2. Cet aspect champêtre, caractérisé par des plaines dégagées, des étendues forestières montagneuses et plusieurs lacs, a autrefois attiré les premiers colons, puis les touristes. Aujourd’hui, la population est en pleine croissance.
Le territoire actuel de Prévost a fort probablement été foulé par des groupes des Premières Nations, et plus particulièrement les Weskarinis, bien avant l’arrivée des premiers Européens. Cependant, à ce jour, aucune trace tangible n’a été découverte. La rivière du Nord, qui traverse le territoire, permet cependant de croire que les Weskarinis[1] l’ont fréquenté sans y établir de campements.
Avec l’arrivée des Européens en Nouvelle-France à partir du XVIIe siècle, une partie du territoire est séparé en seigneuries, d’abord le long du fleuve Saint-Laurent et de ses affluents. Les Basses-Laurentides se peuplent à partir de 1673 avec le développement de la seigneurie de Terrebonne, puis celles des Mille-Îles, du Lac-des-Deux-Montagnes et d’Argenteuil. Alors que les terres à proximité de la rivière des Mille-Îles sont pour la plupart concédées, il devient nécessaire de s’étendre plus au nord. En 1752, Eustache Lambert-Dumont reçoit l’augmentation de la seigneurie des Mille-Îles, qui va jusqu’aux limites actuelles de Blainville au sud, Saint-Sauveur au nord, Sainte-Anne-des-Plaines et Sainte-Sophie à l’est et Mirabel et Saint-Colomban à l’ouest. Une cinquantaine d’années plus tard, on commence à peine à concéder des terres dans l’actuel secteur de Saint-Jérôme. Ce n’est qu’à partir de 1822 que les premiers colons francophones et anglophones s’installent sur des lots au sud du secteur occupé par Lesage. Vers 1830, un chemin de colonisation, appelé Chemin du Roy ou Grande Ligne, se rend jusqu’au futur emplacement de Shawbridge.
Parmi les premiers colons, l’on retrouve André Lesage, un menuisier d’abord établi à l’Île-Jésus. À partir de 1824, il occupe la terre numéro 24[2] qu’il défriche et qu’il cultive. Celle-ci jouxtait de part et d’autre l’actuel chemin du Lac-Écho qui a longtemps porté le nom de montée Lesage. Au nombre des autres concessionnaires qui s’installent dans le secteur, l’on retrouve entre autres François Pilon, William Smith, Christophe Dagenais, Joseph Dagenais, Jean-Marie Bélanger, François Bélair, Paul Paquette, Jean-Baptiste Gauthier, Jean-Baptiste Maurice, John McColl, François Giroux, Jean-Baptiste Lafrance, Joseph Cadieux[3]. La plupart de ces premiers colons viennent des paroisses surpeuplées du sud, dont Saint-Eustache, Sainte-Anne-des-Plaines ou l’Île-Jésus. Malgré tout, plusieurs d’entre eux revendront leur terre à peine quelques années après leur acquisition.
C’est vers 1831 que William Shaw et Martha Maria Matthews arrivent sur ce territoire où quelques Irlandais protestants tels que les Doherty et Forrest semblent avoir déjà élu domicile. Une petite colonie irlandaise se forme peu à peu autour d’eux. Les Cleary, McConnell, Robinson, Moore, entre autres, s’établissent dans le secteur qu’on identifie comme Mount Pleasant (plus tard nommé Shawbridge). En 1843, un recensement établit à 52 le nombre d’habitants de ce secteur. La communauté anglo-protestante y est majoritaire sept ans plus tard.
Alors que les terres sont pour la plupart concédées jusque dans le secteur de Shawbridge dès 1830, un homme stimule particulièrement le développement du haut de la seigneurie des Mille-Îles et des cantons la jouxtant : Augustin-Norbert Morin. Avocat de formation, celui-ci s’est particulièrement illustré en 1834 par la rédaction des 92 résolutions du Parti patriote avec Louis-Joseph Papineau. Député de Bellechasse sur la rive sud de Québec, il s’intéresse au développement des Laurentides et acquiert lui-même de nombreuses terres dans les futures municipalités de Saint-Sauveur et de Sainte-Adèle à partir des années 1830 et 1840. Pour favoriser la colonisation de la région, il achète plusieurs lots, assure la valorisation de certaines de ses terres, fait construire des moulins et signe des requêtes pour l’ouverture de nouvelles routes.
Assez rapidement, les premiers colons de religion protestante ressentent le besoin d’avoir une église pour se rassembler. Avant la construction d’une petite chapelle en bois rond en 1850, ceux-ci se regroupaient chez William Shaw pour l’office du dimanche. Près de dix ans plus tard, un pasteur s’installe en permanence au village et en 1861, la communauté s’affilie à la Canada’s Methodist Congregation. La même année, un nouveau temple plus spacieux est construit au même emplacement. Puis, en 1925, avec la fusion de l’Église méthodiste, de l’Union congrégationaliste, de l’Église presbytérienne (en partie) et du Conseil général des Églises d’union, le lieu prend le nom d’Église Unie de Shawbridge.
Les paroissiens catholiques fréquentent les églises des secteurs environnants, plus particulièrement Saint-Sauveur et Saint-Jérôme, puisqu’il faut attendre 1909 pour qu’une première chapelle soit bâtie. Les premières écoles voient également le jour entre 1848 et 1852. Une école protestante se situe dans le noyau villageois de Shawbridge alors qu’une école de rang catholique est construite un peu plus au sud. À mesure que la population augmente, des commerces voient le jour : magasin général, bureau de poste, forge, etc. Les premiers colons vivent essentiellement des produits de leur terre. Cependant, celles-ci sont peu fertiles et lorsque le chemin de fer se développe et traverse le territoire, le tourisme devient rapidement un moteur économique important pour la population locale.
Des maisons de pension et des auberges ouvrent leur porte pour encourager le tourisme estival. Le développement du ski dans les Laurentides, à partir de 1905, favorise tout particulièrement Shawbridge qui partage sa popularité avec Sainte-Agathe-des-Monts pendant de nombreuses années. Le tourisme est alors présent à l’année. Le secteur de Prévost devient un centre de villégiature d’été prisé par la communauté juive de Montréal alors que la communauté anglophone, adepte du ski, profite des sites d’hébergement à proximité des gares de Lesage et de Shawbridge. Le développement de la piste de ski Maple Leaf entre Shawbridge et Labelle par Hermann Smith-Johannsen, dit Jack Rabbit, ainsi que la mise en service d’un premier remonte-pente par Alex Foster au début des années 1930 accentuent la popularité de la région pendant encore une vingtaine d’années. La villégiature hivernale perd alors du terrain au profit de Saint-Sauveur et de Mont-Tremblant, puis la pollution importante de la rivière du Nord sonne le glas du tourisme estival. Les chalets sont transformés en résidence permanente et à partir des années 1970 la population augmente rapidement.
L’amélioration du réseau routier, bien qu’il provoque la transformation profonde de Prévost avec la construction de l’autoroute des Laurentides (A-15) dans les années 1960, favorise l’urbanisation du territoire. L’agriculture disparaît peu à peu au profit des maisons unifamiliales et des commerces de proximité voient le jour tout particulièrement le long de la route 117.
Bien qu’assez rapidement des noyaux de population s’implantent dans différents secteurs de l’actuel territoire à partir du milieu du XIXe siècle, il faut attendre le siècle suivant pour que ceux-ci soient reconnus officiellement. Le 27 janvier 1909, le village de Shawbridge naît de la scission de la Municipalité de paroisse de Saint-Jérôme, du Township d’Abercrombie (Saint-Hippolyte) et de la Municipalité de paroisse de Saint-Sauveur. Le nom du village rappelle William Shaw ainsi que le pont (bridge) qui jouxtait ses terres et dont il a été propriétaire pendant un an. En 1927, c’est le village de Prévost qui est officialisé, en détachement de la partie sud de la Municipalité de paroisse de Saint-Sauveur. Comme aucun membre du célèbre clan Prévost de Saint-Jérôme n’habite le secteur, on croit que le nom souligne l’implication politique de cette famille. Jules-Édouard Prévost (fils) est d’ailleurs député libéral du comté de Terrebonne au fédéral au moment de la fondation de la municipalité. Finalement, en janvier 1948, c’est l’érection de la Municipalité de Lesage qui englobe un territoire provenant de la Municipalité de paroisse de Saint-Jérôme, du Township d’Abercrombie (Saint-Hippolyte) et du Village de Shawbridge. Le nom rappelle la famille Lesage, pionnière dans ce secteur. L’union des trois municipalités a lieu sous l’appellation de Corporation municipale de Shawbridge en 1973. Le nom définitif de Prévost est établi le 15 octobre 1977, après avoir écarté plusieurs suggestions, dont Rivière-du-Nord, Belvédère, Mirador et Val-des-Monts.
Les années 1970 sont particulièrement propices à l’émergence de la culture. Déjà, dans les salles des hôtels, des spectacles musicaux d’artistes connus ou de la relève sont présentés. Le Théâtre du Québécois organise des soirées récréatives à la Girouette, une auberge-restaurant. Celle-ci devient l’Antitèk, une petite boîte à chansons où des groupes musicaux, des chansonniers, des troupes de théâtre et de danse, des mimes, etc., offrent des prestations. Bien qu’ouverte pendant une courte période, la Glanerie propose aux artisans de la région la possibilité d'exposer et de vendre leurs créations aux visiteurs. Cet essor se poursuit dans les années 1980 et 1990 avec la naissance de nombreux organismes, dont un comité culturel, la Société du patrimoine de Prévost, le Ciné-Club de Prévost. Plus récemment, l’offre culturelle s’est diversifiée, entre autres avec le Festival de BD qui fête ses dix ans en 2023.
Parallèlement, des organismes communautaires émergent à partir des années 1970 comme la Maison de Prévost, qui propose des activités variées pour la famille, ou l’Association des gens d’affaires, les scouts, les associations de lacs.
Dès 1970, une bibliothèque ouvre à Shawbridge, dans l’édifice Shaw, grâce à un comité de citoyens qui en assure son accès bénévolement. Lieu de rencontre pour la culture et le loisir, les services offerts se sont déployés avec le temps. Depuis 2001, dans une bâtisse mieux située, ce lieu de savoir a pris le nom de bibliothèque Jean-Charles-Des Roches pour honorer la mémoire d’un conseiller municipal et penseur autodidacte. Il est prévu qu’un nouveau bâtiment plus spacieux voit le jour dans les prochaines années.
Les besoins d’un lieu de rassemblement pour l’offre d’activités culturelles, communautaires et de loisir se font particulièrement sentir au début des années 1980. La municipalité acquiert en 1982 l’école anglophone fermée l’année précédente. Des rénovations sont nécessaires afin d’aménager des locaux pour les organismes. Son ouverture a lieu en 1984. Le comité culturel en assure la gestion pendant un certain temps et y propose une panoplie d’activités. Une chorale se forme et y présente des spectacles. Diffusions Amal’Gamme y diffuse sa programmation avant de déménager dans la salle multifonctionnelle de l’église Saint-François-Xavier. La fête nationale s’y déroule même quelques années puis est déplacée sur le site de la gare.
Souhaitant redevenir un pôle récréotouristique important, Prévost encourage le développement de plateaux sportifs plus régionaux. En 1983, lorsque le Parc régional de la Rivière-du-Nord est fondé, la Municipalité participe au projet de déploiement de sentiers qui se terminent sur son territoire et en profite pour bonifier l’offre sportive en construisant un terrain de baseball et des terrains de soccer. Une dizaine d’années plus tard, la piste multifonctionnelle du P’tit train du Nord est aménagée, suivant l’ancien tracé de la ligne du Canadien Pacifique. La Ville favorise le développement économique dans le secteur de la gare et de nombreux commerces émergent.
À partir des années 1980, le souci de l’environnement occupe de plus en plus de place dans l’espace public prévostois. Les problématiques d’aqueduc démontrent que l’eau est une ressource importante. On encourage son économie. Par ailleurs, la dépollution de la rivière du Nord devient un enjeu majeur. Il faut changer les habitudes de vie, s’assurer que les infrastructures sont modernes et adaptées à ces préoccupations.
La construction d’une usine d’épuration des eaux, l’instauration d’un service de cueillette des matières recyclables et compostables et plus récemment l’implantation de la redevance sur les contenants à usage unique (bouteilles d’eau, bidons de lave-glace, verres en carton, etc.) ne sont que quelques exemples de cette volonté d’offrir aux citoyens une ville un peu plus verte.
Avec sa gare centenaire, située en bordure du parc linéaire Le P’tit train du Nord, qui sert maintenant de relais aux cyclistes, l’église Saint-François-Xavier, transformée en un lieu multifonctionnel, le pont Shaw, qui fait partie du patrimoine emblématique de la ville, ou la Réserve naturelle Alfred-Kelly, qui accueille plus d’une vingtaine d’oiseaux de proie du Québec, Prévost a une riche histoire tournée vers l’avenir.
[1] Tribus autochtones nomades de la famille des Algonquins qui ont fréquenté les secteurs entourant les rivières des Outaouais, de la Petite Nation, Rouge, du Lièvre et fort probablement du Nord.
[2] Registre terrier de l’Augmentation des Mille-Îles
[3] Ibid